La campagne BDS (boycott, désinvestissement, sanctions) a été lancée le 9 juillet 2005 par 172 organisations non gouvernementales palestiniennes, un an après l’avis de la Cour internationale de justice déclarant contraire au droit international le mur construit par Israël en territoire palestinien et « le régime qui lui est associé ». Cette campagne s’est développée dans différents pays dans le but d’amener l’État d’Israël à se conformer au droit international et aux résolutions des Nations unies. En Israël même, elle a rallié des soutiens au sein de la minorité anticolonialiste de l’opinion. Mais, parmi elle, tous ne l’appuient pas, notamment pour ce qui concerne le boycott des produits israéliens par les consommateurs d’Europe ou d’ailleurs.
Voici trois points de vue. Celui de Gideon Levy, journaliste depuis 1982 du quotidien Haaretz et l’un de ses éditorialistes politiques, qui a couvert depuis vingt-cinq ans l’occupation de la Cisjordanie, il demande aux Etats-Unis et à l’Europe de prendre des sanctions contre Israël. Celui de l’historien Shlomo Sand, auteur de nombreux ouvrages dont Comment le peuple juif fut inventé (Fayard, 2008), et La fin de l’intellectuel français ? : De Zola à Houellebecq . Il est devenu favorable au boycott en 2015 quand il a pris conscience que la société israélienne ne pourra condamner la politique de colonisation que si elle ressent l’effet de sanctions internationales. Et celui de l’écrivain et journaliste Uri Avnery, fondateur et l’un des responsables du mouvement pacifiste et anticolonialiste Gush Shalom. Il considère la campagne BDS comme légitime — contrairement aux accusations d’antisémitisme portées contre elle par le gouvernement Netanyahou et, en France, par le Crif et le Premier ministre Manuel Valls —, mais il la juge contre-productive en raison des craintes et des préventions que le boycott des produits israéliens par les consommateurs suscite dans la société israélienne.
Tous les trois se rejoignent pour dénoncer ces accusations d’antisémitisme à l’encontre de la campagne BDS, mais ce troisième point de vue nous incite à réfléchir sur la manière de la mener. Il est essentiel, en particulier, tout en combattant fermement la pénalisation en France du boycott, de ne pas oublier dans BDS la demande du « désinvestissement » des entreprises françaises impliquées dans la colonisation de Jérusalem et de la Cisjordanie, et la demande de « sanctions ». A commencer par la mesure la plus redoutée par le gouvernement Netanyahou : la suspension de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël. Continuer la lecture de Les Israéliens anticolonialistes face au boycott d’Israël